Commencement d'une journée [Anna]

Il était très exactement 8 heures du matin lorsque Jacob Clayton, metteur en scène de la troupe A au Shakespear Theater pointa le bout de son nez. Il était comme à son habitude vêtue avec son style bien particulier vestimentaire, soit une large chemise par dessus un vieux jean et de vieilles bottes le tout accompagné de bibelots clinquants. Il avait garé sa vieille Old Cars non plus et refermait fortement la portière, tenant avec ses dents son café à emporter qu'il avait commandé chez Ben, faute d'avoir assez de main, tenant dans l'une ses clés de voiture qu'il enfonçait dans le verrou et faisait tourner pour fermer sa vieille et précieuse voiture et dans l'autre main il tenait sa vieille saccoche abimée par le temps qui contenait tout se qu'il semblait avoir besoin pour une journée de travail. Enfin il engouffra ses clés dans sa poche et pu prendre son café qu'il porta aussitôt à ses lèvres.

Ses lunettes de soleil rétro sur la tête, toujours ses mèches lui retombant devant ses yeux chocolat il observa le ciel d'un air satisfait, aujourd'hui était une belle journée et Ooh miracle, il n'avait pas la gueule de bois ! Le metteur en scène se pointa dans le hall, montrant son passe d'un geste machinal à Jonathan Dylan et en profita pour lui demander

"Hey Dylan, t'as le journal aujourd'hui ?"

Ce dernier lui en donna un exemplaire qui n'était non loin et Jake le remercia d'un bref signe de tête. Il mit sa saccoche sur l'épaule et s'adossa contre un mur observant se que le journal pouvait bien dire sur l'avant premier de Hamlet, qui était dans une semaine ou moins, la date exacte avait échappé au perfectionniste metteur en scène. Il faillit envoyer ce stupide journal à l'autre bout de la pièce lorsqu'il vit qu'on avait une fois encore oser l'appeler Jacob et non Jake, et alors que le metteur en scène levait le bras pour prendre de l'élan il découvrit que dans sa trajectoire se trouvait une magnifique actrice, timide et exemplaire qui répondait parfois au nom d'Anna Ferderson. Le metteur en scène sourit et se dirigea vers elle en disant d'un air plus calme que jamais :

"Comment vas ma chère Anna aujourd'hui ?"

[Bon, premier post… Tadaaam ! *ZBAF*]

Anna Ferderson s’était encore une fois levée tôt ce matin. Couchée tard et levée tôt. Autant dire que la logique ne faisait pas partie de ses habitudes. Pourtant, même si elle n’était pas restée à déambuler dans son appartement, préférant encore une fois sortir pour se promener alors que tout le monde était endormi, la jeune femme ne semblait pas fatiguée. D’ailleurs, elle avait déjà déjeuné et s’était préparée pour venir au théâtre, la seule différence avec les autres membres du Shakespeare, c’était qu’Anna faisait tout cela à des heures trop matinales.

Cependant, elle se sentait en pleine forme et prête pour les répétitions d’Hamlet, dont la première se trouvait être pour bientôt. Même si elle savait déjà son texte par cœur, la jeune femme éprouvait parfois ce besoin de le relire, histoire que les répliques de l’illustre Shakespeare n’avaient pas changées entre temps, ou qu’elle ne s’était pas trompée en les apprenant. Allons, c’était idiot, elle n’avait pu commettre d’erreur, sinon, un membre de la troupe A lui en aurait fait la remarque, ou même Jake…

Cette dernière pensée fit sourire Anna, mais d’un sourire timide, presque dissimulé, comme si elle craignait que quelqu'un devine automatiquement, en la voyant si rayonnante, qu’elle pensait au metteur en scène qui faisait battre son cœur. Elle jeta un rapide coup d’œil anxieux dans le Hall du théâtre, afin de vérifier que personne ne l’avait observée. C’était stupide, Anna le savait, mais elle ne pouvait s’empêcher de songer parfois que…

Anna Ferderson se figea. Jacob, ou plutôt Jake, Clayton, venait d’entrer. Elle ne l’avait pas remarquée tout de suite, trop profondément plongée dans ses pensées, mais elle l’avait entendu s’adresser à Jonathan Dylan. Sans un mot, elle l’avait ensuite observé, tout simplement. Elle sourit en le voyant prendre le journal, pour y chercher un article rédigé à propos de Hamlet. Cependant, Jake s’approchait et, probablement furieux par la lecture de « Jacob » au lieu de « Jake », il s’apprêtait à balancer le journal. Ce fut à cet instant qu’Anna apparut dans son champ de vision. Rapidement, elle avait esquissé un geste pour se protéger du journal mais celui-ci ne l’atteint pas, fort heureusement.

Mais à présent, il lui fallait affronter un obstacle plus difficile. Jake s’approchait d’elle. Timidement, elle osa lever les yeux, d’un bleu limpide, pour rencontrer ceux, couleur chocolat, de son metteur en scène. Elle lui répondit sur le même ton calme, malgré son cœur qui battait la chamade :

Bonjour… Et bien, je dois dire que Gertrude se porte à merveille, et je pense qu’il en est de même pour Anna.

La jeune femme avait tenté, tant bien que mal, de faire de l’humour. Elle se servait également de Gertrude comme rempart. Anna Ferderson était une timide, mais pas Gertrude.

Et, comment se porte notre metteur en scène ?

Elle jeta un coup d’œil au journal qu’il avait, apparemment, renoncé à envoyer valser :

Ils ont écrit Jacob… N’est-ce pas ?

Ils ont écrit Jacob… N’est-ce pas ?

"Et c'est pas tout ! C'est la deuxième fois en deux semaines, ils cherchent les ennuis ces satanés journalistes moi je te dis, sa va pas du tout se passer comme ça. Sa fait plus de quinze ans qu'on m'appelle Jake et c'est pas des petits british qui vont casser ça. Tiens, j'ai croisé une vieille dans la rue, devine ce qu'elle à dit "C'est vous Jacob Clayton ?" j'ai même pas répondu sa m'a mit en rogne."

Après ce long, très très long discours de mécontentement, Jake Clayton, sourit, se rendant compter du pourquoi de la chose, il était entrain de faire tout un texte argumentatif à Anna pour une histoire de surnom.. Mais bon.. c'est vrai que depuis quinze ans il avait exigé qu'on le nomme Jake, alors qu'on dise "Jacob".. Le metteur en scène bu une autre gorgée de café, se rapprochant d'Anna afin de lui faire la bise, lui adressant un sourire aguicheur.

Cette jolie jeune fille l'avait toujours intrigué. Plus qu'un metteur en scène, Clayton était psycologue à ses heures, chaque membre de la troupe avait au moins demandé une fois à Jacob des conseils amoureux, sauf Anna Ferderson, c'était la fille qu'il arrivait le moins à cerner. Sans compter les fois où elle mettait tout en oeuvre pour l'ignorer, les autres où s'était tout le contraire.. Bref, c'était assez déroutant et Jacob ne savait pas vraiment comment la prendre.

"Veuillez m'excuser Mlle Ferderson, j'ai faillit vous assommer avec ce journal, croyez moi je me repends de mes fautes."

Dit Jake d'un air commique. Envoyant valser le journal sur la table la plus proche et commença à marcher à travers le hall, faisant signe à Anna de le suivre.

Et, comment se porte notre metteur en scène ?

Jake réfléchis un instant. Si on passait outre le fait que sa soeur disparut depuis dix-huit ans était revenu, pas du tout pour lui mais par pure hasard, qu'il était oncle depuis quelques années sans même le savoir, que l'avant première de leur pièce, Hamlet était pour dans quelques jours et enfin que les journalistes lui tapaient sur les nerfs, alors on pouvait dire que tout allait pour le mieux. Il se sentait en pleine forme, n'avait même pas de problème de santé, son appartement était encore debout et il n'était pas encore dans le coma pour avoir trop bu.. C'était la belle vie quoi. Mais évidement, vous vous doutez bien que jamais le metteur en scène ne commencerait à étaler sa vie..

"Sa va comme sa peut.."

Déclara-t-il en s'enfilant une autre gorgé de café.

"Tu en a pris un où tu veux qu'on s'arrête à la cafet pour que je t'en paye un ?"

[I’m back ! ]

La timide Anna sourit devant le mécontentement de Jake. Depuis le temps qu’ils se connaissaient, elle avait toujours été amusée de le voir s’énerver à tort et à travers sur les journalistes ou les simples passants, ou encore les vieilles dames, qui avaient eu l’impudence de le nommer Jacob. Anna aimait ces instants. C’étaient les seuls moments où elle pouvait être à peu près sûre que personne ne remarquerait son trouble habituel, puisque chacun se concentrait sur le nouveau discours de mécontentement de Jake.

Cette fois-ci, l’histoire de la petite vieille occupait l’attention, et Anna en profita pour fixer Jake, plus intensément qu’elle ne le faisait d’habitude. D’ordinaire, elle n’aurait jamais, jamais osé plonger ses yeux dans les siens mais en cet instant…

A présent, Jake lui faisait la bise. Anna s’efforça tant bien que mal de ne pas rougir. Non, ne pas rougir, ne pas rougir, ne pas rougir. Pauvre comédienne, plus habile à dissimuler sa personnalité sur scène qu’en dehors ! Aucun miroir ne s’était présenté, mais la jeune femme était quasiment sûre d’avoir viré rouge pivoine. En dernier recours, elle tenta de se cacher derrière ses cheveux. Elle baissa rapidement la tête, de sorte que deux mèches soigneusement rangées derrière ses oreilles vinrent se glisser devant ses joues. Un peu maladroit, certes, mais il fallait bien cacher ces joues rouges !

Jake ne devait en aucun savoir. Pourquoi ? Aucune barrière ne s’était pourtant glissée entre eux. Ils ne se détestaient pas, ne vivaient pas dans deux pays éloignés. Aucun d’eux ne sortait avec quelqu’un d’autre. Aïe. Sur ce dernier point… Anna n’était sûre de rien. Elle n’avait jamais vu l’homme qu’elle aimait en compagnie d’une autre femme, mais cela ne signifiait…rien. Il pouvait très bien exister une madame Clayton quelque part dans le monde, perdue en Amazonie ou à deux pas d’ici.

Anna revint à elle. Durant de brèves secondes, son esprit s’était égaré, comme toujours d’ailleurs. Mais cette fois-ci, c’était différent. Elle était avec Jake… qui venait de s’excuser de manière très théâtrale quant à l’envoi de journal. Sans réfléchir, Anna répondit du tac au tac :

J’accepte vos excuses, Mr Clayton, si vous me promettez de ne point vous en rependre trop sévèrement, sans quoi notre troupe se trouverait démunie, sans metteur en scène. Ce serait fatal pour [s]Hamlet[/s]…

Anna redevint sérieuse. Rapidement. Le grand sourire qu’elle affichait se changea en un autre, plus discret. Jake n’avait pas l’air si joyeux qu’il tentait de le montrer. Sa réponse était restée évasive, et la jeune femme devinait que derrière, se cachaient des soucis plus importants. Elle aurait tant voulu lui en parler, mais pour cela, il aurait fallu qu’elle soit moins timide. Elle ne put que répondre, plus bas, d’une voix faible :

Je vois…

La seule réponse de Jake lui donna cependant l’occasion de remettre un peu de joie dans la conversation, du moins pouvait-elle essayer.

Hey ! Un café ? Moi ? Quelle horreur ! Je ne supporte pas ce goût. Si je devais en prendre un un jour, ce serait vraiment pour… pour me remettre sur pieds ! Or, là, je pense être suffisamment en forme pour les répétitions… Mais c’était très gentil de ta part de m’en proposer.

Jake regardait Anna. Anna regardait Jake. Le metteur en scène et la comédienne échangèrent un regard. Clayton avait le regard étonné, il regardait Miss Ferderson le regarder avec animation, buvant ses paroles avant de viré au rouge vif. Il leva un sourcils, avant de rouler des yeux et de reprendre leur discution.

Le silence s'était en effet presque installé entre eux, avant qu'Anna ne recommence à parler avec entrain. Le metteur en scène s'était plongé dans d'intenses réflexions et seccoua la tête lorsqu'il entendu le doux soprano de la miss teinter à ses oreilles.

"Sans metteur en scène. Ce serait fatal pour Hamlet…"

Jake sourit. Il est vrai qu'un troupe d'acteurs sans metteur en scène n'allait pas bien loin. Et il aurait pu se contenter d'acquiescer à la remarque instructive d'Ann', mais évidement son esprit totalement égocentrique et narcissique reprit le dessus, et affichant un sourire fiert, bombant le torse de façon grossière et commique et répliqua d'une voix amusée :

"Sans metteur en scène ? Sans moi tu veux dire !"

La discution dériva sur le sujet de l'humeur moyenne de Jake. L'interlocutrice de ce dernier répondait un "je vois" pas du tout clairvoyant qui faillit énervé Jacob.

Elle voyait ? Elle voyait quoi ? Non elle ne voyait strictement rien, elle comprenait pas, elle ne savait pas et elle n'avait rien à ajouter. Jake n'avait aucune envie de parler ou de se "confier" à quelqu'un en admettant qu'il l'ai fait un jour. Voilà ce que Clayton avait envie de répliquer. Mais aujourd'hui le ciel était bleu, il faisait chaud, Jake était en forme, il sirrotait un café et non un cognac, et sans compter l'épisode "article de journal" sa matiné était tout ce qu'il y a de plus parfait. Alors il prit cela de manière un peu plus posé.

"C'est compliqué.."

Signfiiant ici "J'ai aucune envie d'en parler et c'est pas contre toi." Le metteur en scène afficha un petite moue enfantine deux secondes, comme pour supplier Anna de changer de sujet. Ce qui ne se fit pas attendre, car pendant que Jake buvait une ennième gorgée de café, son interlocutrice lui annonçait qu'elle n'avait jamais aimé ça. Jake faillit s'étouffer.

Le café ? Il adorait, il adulait, il vénérait ça. Bon dieu, mais qu'il aimait celui qui avait découvert le café, et encore plus celui qui avait construit les machines à café. Et il se rendait compte que même après quelques années en compagnie d'Anna, il n'avait jamait vu qu'elle n'aimait pas ça. Toussotant longuement, le metteur en scène finit par s'en remettre et arquant un sourcils comme pour s'attendre à ce qu'elle n'annonce qu'elle plaisante. C'est vrai quoi, Jake proposait de lui payer un café et elle refusait. Le metteur en scène pariait sur le fait que cela lui fasse plaisir.

Jacob agita son café sous le nez d'Anna tout en esquissant un petit sourire et en ajoutant à cela des "Humm... le bon café". Exprimant un petit rire inaudible il ajouta alors d'une voix basse et qui frolait le chuchotement.

"Je suis persuadé que, si tu goutait à MON café, tu le trouverais délicieux."

Jake ria encore une fois avant de boire son fond de café d'une gorgé, jettant tel un basketteur confirmer le verre en plastique dans la poubelle la plus proche. Il se retourna vers Anna en ajoutant d'une voix amusée :

"Domage pour toi il n'y en a plus. Tu ne sais pas se que tu as perdue Ann' !"

Café et thé. Quelle discution passionnante dirait-on. Et pourtant, les deux interlocuteurs savaient pertinement que leur discution allait bien plus loin qu'une stupide histoire de Café ou de Thé. Café, intense breuvage énergique et le Thé doux breuvage apaisant.. Quel résumé imaginé non ?

Jake avait beau avoir jeter son verre de plastique il avait gardé ce qui lui servait de "mélangeur" en plastique également et le prit entre ses dents, le faisant aller de haut en bas de bas en haut, tel un tic. Bah il fallait se réjouir qui ce n'était qu'un morceaux de plastique et pas une cigarette. Mieux vallait un baton de plastique à la clope au bec !

Le metteur en scène commença à marcher lentement invitant d'un signe de la main Anna à le suivre. Il semblait réfléchir, comme plonger dans une abime de réflexion qui devait sans doute conserver ce cher café moulé et cette chère feuille de thé. Il semblait comprendre, il savait que leur discution n'était pas consacré au gout de l'un ou de l'autre, qu'ils étaient entrain de ce lancer bon nombre de sous entendu, mais en fin de compte, le metteur en scène n'avait peut-être pas vraiment idée du sérieux de la chose. Un jeu pour lui, charmant baratineur, un jeu de rôle, une comédie, une farce... Il n'en savait rien. Il ne comprenait peut-être pas si bien.

Ce n’est pas moi qui n’aime pas le café Jake, c’est LUI qui ne m’aime pas…

Jake releva immédiatement la tête pour regarder quelques secondes Anna, se rendant compte que deux secondes plus tard qu'il avait arrêté de marcher. Il reprit aussitôt. Reprennant son sourire aguicheur et amusé et répondit, comme si il emmettait une hypothèse logique chimique :

"Tu te base sur un apriorit. Tu pense que le café ne t'aime pas ou que tu ne l'aime pas, peu importe car tu n'aime pas l'odeur. Comment peut tu savoir si vous vous aimez ou pas si tu ne goute pas de nouveau?"

Clayton était fiert de son petit discourt. S'était sans dout ede la propagande pour le café mais après tout, il devait bien sa au merveilleux supermarché de Riverfall chez qui il achetait son café chéri. ^^

Le metteur en scène marchait toujours au côté de sa comédienne, son "mélangeur" dans la bouche, le prennant parfois pour illuster ses paroles, comme à son habitude parlant en faisant de grands gestes théâtraux. Et puis, Ann' reprit ses paroles pour lui faire la publicité de son thé. Jake sourit. Le thé..

"Je n'ai jamais dit que je n'aimais pas le thé ou bien que je préférais le café. Mais le matin il est vrai que j'adore le café.. Après le thé.. c'est une autre histoire."

Si vous voulez vraiment tout savoir. Si vous vous intéressez aux paroles plus qu'au double sens, Jake avait toujours connu sa soeur buvant du thé. Et depuis dix-huit ans, il n'en buvait donc plus une goutte. Il n'avait aucune idée de ses préférances désormais, mais en tout cas c'est l'image qu'il gardait d'Emily Clayton le matin. Alors le thé.. Ma foi s'était pas pareil que le café ^^

Si on les entendait discuter, on aurait pu les prendre pour deux personnes n'ayant vraiment rien à se dire. Faire tout un débat sur le café ou le thé, cela était spécial. Il fallait les connaitre, si fallait deviner leur tendre pensée pour comprendre..

Un jour, je goûterai peut-être à nouveau du café… Mais je ne promets rien !

Jake sourit à nouveau, prenant entre le pouce et le majeur son petit mélangeur, telle la baguette d'un professeur. Il plissa les yeux, faisant un grand pas pour prendre de l'avance sur sur Anna, se retourna subitement pour lui barrer la route. On s'attendait très certainement à un grand discours argumentatif, avec les phrases interminablement théâtrales du metteur en scène mais il ne déclara enfaite que quelques mots, d'un ton de défi :

"Oui, le jour où tu oseras enfin goûter à ce breuvage !"

[Désolée pour le retard…]

"Tu te base sur un apriorit. Tu pense que le café ne t'aime pas ou que tu ne l'aime pas, peu importe car tu n'aime pas l'odeur. Comment peut tu savoir si vous vous aimez ou pas si tu ne goute pas de nouveau?"

Il fallut beaucoup de courage à Anna Ferderson pour ne pas rougir à nouveau. Au premier abord, la conversation tournait effectivement autour du thé et du café, mais au second, la jeune comédienne y voyait autre chose. Elle se croyait alors la seule des deux à deviner le double sens de ces paroles anodines, mais cependant, un doute la prit. Se pouvait-il que Jake… ? Non, impossible. Faisant mine de ne comprendre que le sens premier des paroles du metteur en scène, Anna se décida enfin à « jouer » un rôle. Certes, elle n’allait pas changer radicalement de personnalité, mais elle ferait comme si… Comme si quoi ? Il n’y avait rien entre eux.

"Je n'ai jamais dit que je n'aimais pas le thé ou bien que je préférais le café. Mais le matin il est vrai que j'adore le café.. Après le thé.. c'est une autre histoire."

Une autre histoire. Oui, c’était sans doute ainsi. Anna n’y pouvait rien. Et pourtant, elle aurait tant aimé ! Mais il lui fallait un courage qu’elle n’avait pas. Et c’était ainsi, la triste existence d’Anna Ferderson, la timide comédienne. Si elle se faisait renverser par une voiture et qu’elle décédait sur le coup, sa tombe porterait l’inscription :Ici gît Anna Ferderson, comédienne trop timide qui préféra boire du thé sans jamais se risquer à goûter au café et qui n’osa jamais avouer ses sentiments à Jacob Clayton…Ensuite, elle s’imagina Jake furieux, rayant dans la pierre tombale le nom de Jacob sans lire ce qui suivait. Si elle mourrait, elle emporterait ce secret avec elle et… Mais quel pessimisme ! Et toutes ces rêveries et divagations stupides à cause d’une trop grande timidité !

"Oui, le jour où tu oseras enfin goûter à ce breuvage !"

Soudain, le courage lui vint. Le courage de goûter au café, de dire à Jake ce qu’elle ressentait. Tout, tout ! Il était temps. Elle ne voulait pas mourir sans lui avoir dit. Et même si elle ne se voyait pas mourir de sitôt, elle allait lui annoncer. Là, maintenant, dans le hall du théâtre.

Jake, il faut que je te dise un truc…

Anna s’arrêta net. Un miaulement strident, tel un matou hurlant à la mort tandis qu’on essayait de lui retirer le coussin sur lequel il se trouvait pelotonné, retentit. La jeune comédienne mit un certain à se rappeler qu’il s’agissait de la sonnerie de son portable. Guère discrète. Se mordant la lèvre inférieure en maudissant le téléphone, elle plongea la main dans son sac, une espèce de confection qui de loin passait pour une tête d’oreiller décorée de pampilles et autres broderies à moitié décousues dont certaines se détachaient en longs fils de couleurs vives. Enfin, elle mit la main sur son portable, décrochant avant même de l’avoir sorti du sac, afin de faire taire le miaulement du chat agonisant devant le vol de son coussin. Elle croisa le regard de Jake furtivement.

Excuse-moi…

Puis, elle se reporta au téléphone.

Oui ?... Prudence ? Arrête, tu sais très bien que je ne viendrai pas… Je ne changerai pas d’avis. Oui. Non. Au revoir.

La Conversation avait été brève. Sa sœur, évidemment. Anna et Prudence étaient en froid depuis des lustres, et leurs querelles ne prenaient jamais fin. Fourrant le maudit téléphone dans son sac, la jeune comédienne se retourna vers Jake.

Désolée. Une… connaissance que j’essaie d’oublier.

Jake, il faut que je te dise un truc…

Evidement.
Du sérieux dont Jake Clayton ne s'attendait pas vraiment. Du délire tout ça, rien que tu délire. De quoi se rendre de bonne humeur avant d'entamer une rude journée. Rien de sérieux, pas de paroles prononcées avec gravité SURTOUT jamais un regard dans le coin qui fait sérieux, jamais de baissage de tête pour signifier qu'on ne prend pas tout cela à la légère, hors de question de prenage de main ou de regard doux et triste. Surtout, impérativement JAMAIS de : Jake, il faut que je te dise un truc.
Evidement.
Du sérieux dont Jake Clayton ne voulait même pas entendre.

Mais la curiosité rongeait plus qu'autre chose le metteur en scène qui était impatient, humm si impatient de savoir les mystères d'Anna Ferderson. Qu'allait-elle lui sortir ? Quel café rêvait-elle de gouter ? Enfin la très secrète Mademoiselle Ferderson allait se confier, et dévoiler quelque chose qu'elle gardait pour elle depuis trop longtemps. Jacob la regardait intensivement, son regard ne quittait plus celui océan de sa comédienne. Il attendait simplement qu'elle ne finisse sa phrase.
Qu'elle ne finit pas.

Une sonnerie de téléphone aussi horripilante qu'originale retentit. Le metteur en scène crut sérieusement qu'il allait éclater ce portable contre la porte. Maudit soit cet engin qui lui avait gaché les dix-huit dernière années, et lorsque ce n'était pas le sien, c'était celui des autres. Pourquoi ce.. ce truc sonnait TOUJOURS au mauvais -ou bon ?- moment ?

Jake leva les yeux au ciel et sourit légèrement, attendant que le coup de file se termine, ce qui fut vite le cas. Elle racrocha enfin déclarant que c'était une personne qu'elle essayait d'oublier. Le metteur en scène acquiesça, n'osant lui demander le reste de sa phrase.

*Imbécile, tu vas pas jouer les accros, elle va finir par elle même.*

Un lourd silence pesait sur leur tête, Jacob donnait l'air attendre, peut-être pour rappeler à Anna qu'elle avait un phrase à finir.

[Aïe. Tu vas me détester XD. D’une part parce que je suis en retard, mais aussi après la lecture du post. J’ai envie de dire que non, Anna n’est pas d’une nature très… enfin tu verras lol]

Effectivement, tout cela n’était que du délire. Anna Ferderson ne pouvait être devenue moins timide en si peu de temps. D’accord, sur scène, elle se montrait à la hauteur, mais ce n’était plus Anna à ce moment, mais son personnage. Ah, si seulement elle pouvait garder ne serait-ce qu’une infime partie de la personnalité plus extravertie de Gertrude, sans pour autant hériter de ses mauvais côtés, que Shakespeare n’avait pas hésité à mettre en avant, au lieu de redevenir cette comédienne fragile. Pour définir la jeune femme, la plupart des gens la caractérisait de douce, timide, fragile. Mais Anna ne voulait pas être cette jeune personne douce-timide-fragile. Absolument pas.

Elle était amoureuse, profondément amoureuse, et savait qu’elle regretterait toute sa vie de ne jamais l’avoir dit. Personne n’était au courant. Elle s’était bien gardée de se confier à Elena et Melody, et encore plus auprès de Jake. Et pourtant, ce n’était guère difficile ni insurmontable. Il fallait juste dire : « Jake, je suis amoureuse de toi ». A peu près, en tout cas. Mais non. Pas pour Anna Ferderson. La jeune fille souffrait donc de cette maladie incurable et rarissime nommée « Timidité » ? Il fallait croire que oui. Et même si elle s’était sentie courageuse un instant, ce (satané) coup de fil avait tout gâché. Prudence. Ah vraiment ! Sa sœur ne savait vraiment pas choisir son moment pour déranger les gens !

Ayant raccroché subitement, Anna s’était retrouvée dans le silence le plus complet auprès de Jake. Elle entendait son cœur dont les battements redoublaient de vitesse à mesure que les secondes passaient. La jeune femme avait l’horrible impression que ce tintamarre intérieur pouvait être entendu de l’extérieur. Déconcertant et étrange. Elle qui ne savait plus quoi dire, voilà que son cœur parlait à sa place ! Dit de cette façon, cela pouvait passer pour romantique, de cette romance mièvre que l’on retrouve si souvent dans les romans. Ah, maudit cœur, maudite timidité ! Satané silence !

En effet, le silence était le seul bruit perceptible dans le hall du théâtre. Anna et Jake. Seuls. Si la jeune femme lui disait maintenant, personne ne saurait. Personne ne la verrait rougir ou pâlir, personne. Cette situation était à la fois avantageuse et désastreuse. La comédienne priait intérieurement pour que surgisse de nulle part un membre de la troupe. Lena ? Melo ? Phen ?
Mais où donc étaient-ils passés ?

S’apercevant soudain du regard insistant de Jake, Anna trouva finalement judicieux de répondre quelque chose, pour qu’il ne la prenne pas pour une idiote (il ne manquerait plus que ça !). Oui, mais quoi ? Avant son coup de fil, elle avait bien commencé une phrase…

Jake, il faut que je te dise que… En fait… En fait, je crois que je suis amoureuse… De quelqu’un…

Elle l’avait fait ! Anna Ferderson l’avait dit ! Ou presque. D’accord, elle avait finalement avoué à Jake qu’elle aimait, mais sans pour autant préciser qui…

[Je te déteste xD Non sérieux, tu avance, lentement mais surement !]

Jacob attendait avec une part d'apréhension et d'impatience la suite des évênement. Il n'aimait vraiment pas les discutions sérieuse, les "Jake, il faut que je te dise..". Que voulait-elle lui dire ? Jacob s'attendait à tout. Etrangement, cela lui nouait l'estomac. Comme si il présentait quelque chose sans savoir quoi ou sans vouloir s'avouer se que c'était... Il regardait intensément Anna Ferderson, qui raccrochait son téléphone portable avant de se reconcentrer sur lui. Ils s'observèrent un instant, en silence...

Un silence de plombs, les battements des coeurs des deux protagonistes battaient à l'unison.. Ils battaient vite.. Le regard chocolat de Jake ne quittait plus celui océan d'Anna. Il attendait, en silence, ne voulait ni ne pouvait le rompre.

Mais l'impatience était aussi présente. Enfin, Jacob Clayton percerait-il le voile mystérieux dont se couvrait sans arrêt la jolie artiste ? Allait-elle enfin ce confier ? Elle qui ne parlait à personne, elle qui était si réservée.. Enfin.. elle cassa ce silence en prononçant une simple phrase de manière hésitante.

Jake, il faut que je te dise que… En fait… En fait, je crois que je suis amoureuse… De quelqu’un…

Le metteur en scène ne cilla pas. Il fit tout son possible pour rester de marbre, le temps de se remettre de toute ses émotions, de toute ce qu'il ressentait en même temps. Un soulagement intense, un certain étonnement et... Un autre chose.. mais quoi ?

"C'est bien ! Moi qui commençait à me dire que tu allais devenir bonne soeur ! Alors comment il s'appelle ? Je le connais ? Raconte moi tout, je veux tout savoir !"

Jacob parlait extrèmement vite,peut-être pour camouffler son trouble, il affichait un sourire tordu, expirant lentement, attendant qu'elle ne réponde avec une certaine apréhension.. encore une fois.

En fait, il ne sait pas que je suis… Enfin je… Je ne lui ai jamais dit. En fait c’est… Il est au théâtre.

Le metteur en scène avait bien du mal à rester parfaitement immobile, tout simplement détendu, comme il était à la normal. Si il ne dansait pas d'un pied à l'autre, il jouait avec son mélangeur en plastique toujours coincé entre ses dents, ou bien il se torturait les doigts, noyer dans l'océan bleu clair qui servait de regard à Miss Ferderson. Jake se mordillait l'intérieur de la bouche. Bon dieu il était bien meilleur comédien en temps normal. Mais.. LE TEMPS ETAIT NORMAL.

Il savait, oui tout au fond de lui même, bien enfouit, bien cacher, fermer à clé au fond de son coeur sombre, surtout isolé, muet au yeux de tous, au yeux de lui même. Ne jamais savoir, ne jamais regarder dans son coeur, ne jamais réfléchir deux secondes à la question. Mais il savait, il savait parfaitement au fond de lui ce qui allait suivre. Il savait comment tout cela allait se terminer. Il connaissait d'avance chacun des mouvement d'Anna, il connaissait chacune de ses réactions par coeur. Il était un stupide automate qui répétait une scène à laquelle il avait trop souvent réfléchi. Réfléchi au fond de lui, qu'il avait imaginer sous des dizaines de formes, des centaines de formes, au fond de lui, sans se l'avouer, sans oser y penser. Oui....

"Je sais"

Déclara-t-il, pensant tout haut. Jake s'étonna de lui même. Qu'est ce qui lui avait prit ? Pourquoi avait-il dit cela ? Non ce n'était pas écrit dans le scénario, ne jamais faiblir, ne jamais réfléchir, ne jamais s'imaginer quelque chose qui ne devait pas être, ni jamais fléchir, ne jamais perdre ses moyens. Non il y avait strictement aucune, oui carrément aucune raison pour justifier le fait qu'il de perdre ses moyens. Rester de marbre, ne pas froncer les sourcils. Il s'était imaginé la scène, il connaissait son texte. Il savait. Il savait comment cela devait se terminer. Il savait.. Sans vouloir savoir.

Quelqu'un, quelqu'un au théâtre. Bien sur, il savait qui s'était. Cette douleur insuportable au fond de ses entrailles, se monstres brulant lui criait le nom de cette personne. Mais Jake Clayton se bouchait les oreilles aux hurlements déchirant du monstre, il n'entendait pas, il ne voulait pas entendre. Il ne savait pas, il ne voulait pas savoir. C'est pourquoi il observa Anna, d'un air interrogateur.

"Que.. pardon fait pas attention à ce que j'ai dit. Donc.. Je ne crois pas que tu aies répondu à ma question. Qui donc fait battre le coeur insoucient de la belle Anna Ferderson ?"

Du déjà vu, il connaissait la réponse, il ne voulait simplement pas l'entendre. Celui qui se tenait devait la comédienne ne savait rien, il était stupide devant elle, attendant une réponse, n'importe quelle réponse, oui tout les réponses possibles. Il s'imaginait ce qu'il s'était déjà imaginé auparavant.

"Quelqu'un du théâtre... Le suspence est insoutenable Ann' !"

Ajouta-t-il parodiant la voix d'une adolescente superficielle qui viendrait d'apprendre que Bryan avait flashé sur une autre fille, voulant à tout prit savoir qui était cette chanceuse. Il arborait un sourire de bonne humeur, il se rassurait, ses talents d'acteur étaient revenus.

[Tadaaam ! Voili voilou ! Maintenant, place au suspense ! ]

A l’instant où Anna Ferderson avait prononcé ses dernières paroles, elle eut l’impression que son cœur s’arrêtait de battre. Une sensation bien étrange quand on connaissait la vitesse de ses battements cardiaques lorsqu’elle se trouvait d’ordinaire en présence de Jake. Pour la première fois dans son existence, Anna devenait morte aux côtés de son metteur en scène. Morte. Du moins au fond d’elle. A l’extérieur, elle s’efforçait tant bien que mal de faire bonne figure elle aussi. C’était une journée normale après tout, non ? La jeune comédienne partait répéter tranquillement au théâtre, en compagnie de son metteur en scène et… Non. Cela ne sonnait pas du tout normal.

"Je sais"

Anna sursauta en entendant cette réponse. Non, impossible. Cela ne pouvait pas être. Jake ne pouvait tout de même pas connaître ses sentiments. Elle s’était donnée tant de mal pour que personne ne remarque son trouble, le même qui venait sans cesse la torturer. Lorsqu’elle répétait une scène, elle n’osait jamais porter son regard vers le lieu où devait se tenir le public, certaine d’y rencontrer les yeux de Jake. Lorsque la troupe se retrouvait lors d’une pause pour bavarder et se détendre, Anna feignait de réviser encore ses répliques, afin de cacher son visage derrière des feuilles de papier. Parfois, son cœur se mettait à battre si vite qu’elle craignait que quelqu’un puisse l’entendre et lui demander : "et bien Ann’, pour qui bat si fort ton cœur ?". Par dessus tout. Sa plus grande crainte.

"Que.. Pardon fait pas attention à ce que j'ai dit. Donc... Je ne crois pas que tu aies répondu à ma question. Qui donc fait battre le coeur insouciant de la belle Anna Ferderson ?"

Le cœur insouciant de la belle Anna Ferderson en question était au plus mal. Un vrai désastre. Lui dire ? Non. Fuir ? Volontiers ! Encore fallait-il trouver une pirouette pour échapper à cet interrogatoire, mais la comédienne n’avait pas la répartie facile et ne se sentait pas capable d’échapper ainsi à des questions aussi insistantes qui exigeaient une réponse. Il n’y avait pas d’échappatoire. Ou alors si, il restait une dernière solution : partir en courant, ce qui n’était vraiment pas envisageable dans pareille situation.

"Quelqu'un du théâtre... Le suspense est insoutenable Ann' !"

Aïe ! Enfin cette extrémité. Anna Ferderson se mordit la lèvre inférieure et baissa la tête vers le sol, pour éviter encore une fois de croiser le regard de Jake qui ne manquerait sans doute pas de deviner ce qu’il devait ignorer à tout prix. La jeune comédienne fit quelques pas, seule. Elle s’arrêta brusquement et se retourna. Le bleu de ses yeux semblait s’être intensifié, comme celui de l’océan juste avant la tempête. Le regard affolé qui s’y trouvait encore quelques secondes auparavant avait disparu, remplacé par une sorte d’anxiété, mais aussi par un calme, un calme résolu, comme celui que peuvent avoir les mourants juste avant leur trépas. Ils savent ce qui les attend, ils connaissent leur fin. Il en était ainsi pour Anna Ferderson. Elle savait que la révélation qu’elle s’apprêtait à faire ne rencontrerait que le vide en retour. Elle n’y pouvait rien. Son cœur saignerait, mais ce serait sans doute mieux ainsi.

Jake… C’est toi que j’aime.

Enfin, elle l’avait dit. En fixant les yeux de Jake, sans ciller. Elle s’était jetée dans l’océan, tout en sachant pertinemment qu’elle finirait noyée. Il ne restait plus qu’à attendre maintenant. Attendre une réponse. Attendre de se noyer, de se retrouver tirée vers le fond par la force du désespoir…

Jake… C’est toi que j’aime.

Où était-il ? Dans un cauchemar ? Dans la peau d'un personnage d'une tragédie ? Perdu dans le néant terrifiant de l'enfer ? Quelque part, oui quelque part dans les ténèbres, perdu, confus, vouer à une mort certaine.

Le metteur en scène ne bougea pas. Il ne fit pas un seul mouvement. Il ne cilla pas, il ne dit rien, il se contenta de rester là, telle une statue de marbre, regardant intensément Anna Ferderson. Il coulait dans l'océan bleu de ses yeux, le regard chocolat de Clayton, d'habitude si rieur et de bonne humeur avait changé du tout au tout. Il était déformé par la surprise, par l'horreur de la situation. OUi, "l'horreur" sachez très chers que je pèse mes mots un à un. Jacob ne trouvait pas d'autres qualificatifs, il était en plein cauchemar.

Jake… C’est toi que j’aime.

Pourquoi ? Pourquoi lui ? Pourquoi ELLE l'aime LUI ? Il n'y avait carrément aucune raison, Jake, ce courreur, cet ivrogne, elle cette jeune comédienne rêveuse et timide.. NON NON NON et NON. Elle ne DEVAIT pas l'aimer, c'était contre nature, tout ceci n'était pas normal.

Un profond sentiment de culpabilité envahi Clayton. "Je ne dis pas que je n'aime pas le thé" "il faut que tu goute le café". Quel idiot ! Mais quel idiot ! Il avait tout fait pour que cette pauvre comédienne se prenne au jeu et voilà que c'était lui même qui était tombé dans le piège. Il était bête, il était cruel, il avait tellement honte.

Que diable comment allait-il se sortir de cette situation? Anna, Ooh oui, sa préférée, sa chouchoute de la troupe. Cette comédienne si talentieuse.. Plus jamais rien, non plus jamais rien ne serait comme avant. Tout était cassé, tout s'était effondré en même tant qu'Ann avait prononcé ces mots :

Jake… C’est toi que j’aime.

La faire souffrir, c'était le seul moyen de stopper cette folie. Cela ne pouvait être sincère ! Ce n'était qu'une amourette, ce n'était pas un réel amour non, loin de là.. le contraire était impossible.. Impossible à supporter. Le trouvait-elle bel homme et apréciait-elle sa compagnie ? Jake priait pour que ce soit tout. Comment pouvait-elle l'aimer autrement de toute manière ? Il passait ses nuits au bar ou à l'hotel. Elle ne l'aimait pas, elle ne pouvait pas l'aimer.

D'un seul coup, cet perspective qu'Anna aime Jacob apparut à ce dernier comme une évidence absolu. Tout ce qu'il savait au fond de lui ressurgissait pour l'insulter de ce manque de clairvoyance. Il avait été pire que sot ! Tout les actes de Miss Ferderson prenaient un sens différent. Jake se maudissait pour être si peu intelligent, lui qui se croyait le meilleur de tous, son estime de lui descendait en flèche. Il maudissait tout ces jours où il était arrivé avec la gueule de bois, il maudissait toute ces femmes qui l'aviat attendu, au loin dans les gradins, mais ce qu'il maudissait par dessus tout ces tout ces sous entendus idiots, tout ces gestes pour laisser espérer quelque chose avec Anna.. Il se maudissait lui même.

Il reprit enfin du mouvement. Jacob se passa une main dans les cheveux, regardant autour de lui en mordillant sa lèvre. Il essayait de sortir, de revenir à la surface, de ne plus nager dans l'océan bleu clair d'Anna.

Que diable ce n'était qu'une fille -qu'une femme. Il en avait vu d'autre, pourquoi se mettre dans un tel état ?

*Les autres, elles ne m'aimaient pas.*

Jacob se passa la langue sur ses lèvres pour les ré-hydrater. Les autres... Elles semblaient tellement insignifiantes désormais. Tellement.. Tellement moins.. Machinalement Jake se fit craquer ses dix doigts, cela le détendait toujours. Il enfouit enfin sa main dans la poche pour en sortir un paquet de cigarette en s'en mit une au coin de la bouche, avant de sortir son briquet pour l'allumer. Il recracha la fumée toxic sur le côté, de façon à préserver Anna de cette nuisance. Oui.. il s'était promis d'arrêter.. Et puis ?

Le tabac, l'alcool, tout ce qu'il s'était promis de réduire ou de stopper n'était pas le sujet, et tout ceci était d'une importance minime comparer à cet instant pénible. Le silence était de plombs, Clayton essaya de le briser, ouvrant la bouche pour se raviser à chaque fois et la refermer. Que dire ?

Enfin, après quelques hésitations et bafouillements incompréhensibles, il finit par déclarer quelque chose, sa voix ne tremblait pas mais s'était tout juste. Il reposa son regard chocolat chaud sur Anna, l'observait, elle n'était pas mieux que lui, elle était tout aussi troublée, si ce n'est plus. Cette vision dégoutait le metteur en scène de lui même.

"Je.. enfin.. je ne suis pas quelqu'un pour toi.. tu.. tu t'en doute.."

Ridicule.
Pathétique.
Tragique.

Jacob Clayton refusait par dessus tout qu'Anna Ferderson l'aime.

La voir dégringoler. La voir tomber du haut de la montagne de ses songes, de ses espoirs. La voir s'écraser, se rapprocher d'un sol qui l'amocherait. La voir se mourir peu à peu. Sans rien pouvoir faire. Sans pouvoir tendre la main pour la secourir. Sans pouvoir se jeter derrière elle pour l'attraper et la faire planer au dessus des nuages. Non, Jacob Clayton n'avait plus le droit de la secourir, c'était lui qui l'avait pousser du haut de cette montagne, et c'était par sa faute qu'elle s'écrasait sur le sol, se laissant emporter ensuite par l'océan de torpeur et de souffrance, qui la faisait dériver à droite à gauche. Balotée de port en port avec son visage décomposé par la prise de conscience, voilà comment était Anna Ferderson. Et Jacob ne supportait pas cette vision. Cette si belle jeune fille -femme- désormais portait un masque qu'il lui avait lui même accroché au visage. Il était l'auteur de sa douleur, il devinait les larmes qui allait s'écouler d'une minute à l'autre de l'océan de son regard qui le fuyait.

Et comment diable allaient-ils faire maintenant pour continuer ? Ils allaient être deux amis, Jake lui offrirait une tape amicale dans le dos ? N'importe quoi. Il la faisait souffrir tout les jours depuis la nuit des temps. Il était un bourreau qui lui coupait sa gorge. Il était l'archer qui lui tirait une flèche mortelle. Il était l'éxécuteur d'une sentance pire que sa mort. Il la faisait tellement souffrir, il le lisait dans son regard. Jacob eu un intense envie de s'enfuir, de partir, de ne plus revenir, de boire, de fumer, de se droguer de faire n'importe quoi du moment qu'il ne se rendait plus compte de la situation. Avec un peu de chance il tomberait dans le coma se qui lui permettrait de fuir encore plus la réalité. Une situation qu'il avait lui même déclenché, dont il était le fautif. Mais voir Anna si.. si.. mal -il le devinait assez sans qu'il n'ai besoin de la regarder, et pour cause il regardait partout sauf dans les yeux d'Anna- lui déchirait le coeur, les membres... Il ressentait se qu'elle ressentait et cela ne lui plaisait pas du tout.

Diable qu'il aurait voulu voler à son secour, la ramener dans les nuages, la mettre en sécurité. Mais comment le faire sans qu'elle ne recommence à espérer ? Car il ne POUVAIT pas l'aimer, elle ne POUVAIT pas l'aimer. Ils ne POUVAIENT pas s'aimer. Et pourtant, le soprano d'Ann' retentit, sa petite voix, son souffle qui lui murmurait en tremblotant :

J’ai un cœur qui me dit chaque jour que c’est toi et personne d’autre que j’aime, même si cela n’est pas réciproque…

Jacob avait envie de se boucher les oreilles. De ne plus entendre un mot de se qu'elle racontait. Pourquoi ? Comment pouvait-elle l'aimer ? Qu'avait-il pour lui plaire à elle ? Pourquoi n'était-elle pas tomber sous le charme de son séduisant voisin de vingt ans qui rêvait de fonder une famille et de vivre une histoire romantique ? Jacob serra le poing. Non, elle n'aimait personne d'autre que.. LUI. Et c'était insuportable. Pour plusieurs raisons d'ailleurs. Insuportable car cela la faisait souffrir. Mais aussi car, quand bien même Jake ne mettrait pas tout de suite une barrière, quand bien même Jake se laisserait aller sans penser au futur, cela ferait souffrir Anna. Car Jacob n'avait aucunement envie d'une relation.. stable. Ni de tout se qu'Anna avait le droit d'avoir ou de souhaiter.

"Tais toi."

Jake regretta immédiatement d'avoir dit cela. Son ton était si sec. Pourquoi est-ce qu'il l'avait dit si méchament ? Il se maudit encore plus de l'intérieur. Parce qu'il ne supportait pas qu'elle l'aime ? Parce qu'il ne supportait pas de ne pas pouvoir en faire plus pour l'aider, pour la sauver ? Clayton prit d'une main qui tremblait presque la cigarette de sa bouche, recrachant la fumée sur le côté comme la dernière fois. Il ne souhaitait pas tourner la tête de nouveau pour affronter Anna et son regard.

Je ne serai pas en retard pour la répétition. Et je jouerai bien Gertrude.

Ces paroles étaient sans doute les pires que Jacob s'était donné d'entendre dans sa vie, après bien sur il y a dix-huit ans le coup de fil de sa soeur qui lui promettait que jamais ils ne se reverraient. La ton de Miss Ferderson essayant péniblement de se faire sûre et décider. Parlant de théâtre. Mais quel était le théâtre déjà ? Qui était cette Gertrude ? De quoi parlait-elle ? Jacob secoua la tête quand il se rendit compte qu'Anna partait, elle s'en allait loin. Il aurait vraiment dut la laisser partir mais non. Il lui courrut minablement après, la rattrapant par le bras, la retournant de force pour la plaquer contre un mur. Là, il la regarda intensément dans les yeux, affrontant enfin la vérité en face. Lui aussi, d'une voix décidée, assurée, presque menaçante il dit alors :

"Tu ne peux pas savoir comme j'en ai rien à faire du théâtre Anna. Je me fiche totalement d'Hamlet. Qu'ils aillent tous en enfer si sa leur chante. Rien ne me préoccupe plus que..."

Jake se stoppa soudain. Qu'aillait-il dire ? Qu'allait-il OSER dire ? Comme bloqué il ne pouvait plus du tout parler. Plus rien dire. Simplement regarder Anna, et puis être spectateur de la scène, sa cigarette dans une main bloquant un des poignet d'Anna, l'autre main s'occupant de l'autre poignet. Leurs visages si décomposés, surpris tout deux.. à quelques centimètres qui ne demandaient qu'à se rapprocher. Les yeux grands ouverts, Jacob était témoin de se qu'il faisait, le spectateur de la scène et non l'acteur. D'ailleurs qu'était-il entrain de faire ?

Il fallait se stopper avant de faire une erreur, il fallait arrêter tout ceci. C'est pour cela que Jacob libéra un poignet d'Anna pour replacer la cigarette dans sa bouche, dressant une nouvelle fois une barrière. Il la lacha complètement, reculant d'un pas presque chancelant pour aller en direction de la porte, ses yeux toujours exorbiter. Il poussait le battant d'une main, inspirant la fumée toxic de sa cigarette avec avidité. Il ne méritait pas moins. Il dériva jusqu'à sa vieille voiture, s'adossant contre elle. Jetant sa cigarette sur le sol, la foulant au pied pour l'éteindre avant d'en rallumer une autre.